Pourquoi adopter une stratégie en matière de territorialité des données ?
La donnée doit aujourd'hui être considérée comme un bien stratégique, dont il est nécessaire d'assurer la protection et la sécurisation. Ce premier volet d’une série d’articles sur la territorialité des données est consacré aux enjeux de souveraineté.
La transformation numérique des organisations est un phénomène devenu incontournable. Il exerce une influence sur l'ensemble des secteurs de la société belge. Cette mutation profonde repose sur l'utilisation de données numériques produites en quantités massives : c'est ce que l'on appelle les Big Data (ou mégadonnées). Une fois interprétées, elles sont exploitées de manière à optimiser le fonctionnement de l'organisation concernée, qu'il s'agisse d'une entreprise, d'une institution, d'un hôpital ou d'une collectivité. Où sont-elles hébergées et avec quel niveau de sécurité ? Là est tout le défi auquel sont confrontés l’ensemble des CIO et IT Managers en 2021.
Qui sont les acteurs des Big Data ?
La plupart des acteurs qui dominent le marché de la donnée en 2021 sont des entreprises étrangères, le plus souvent américaines ou chinoises.
Cette extra-territorialité de l'hébergement de données sensibles pose donc question, à plus forte raison dans des secteurs comme les soins de santé et les institutions publiques.
L'hébergement sur des serveurs distants échappant à la légalisation nationale représente une menace à l'égard du traitement de données sensibles : qu’on parle de citoyens, de patients ou encore de secrets d'entreprise.
La maîtrise de la donnée par des acteurs non européens revient à accorder une forme de pouvoir à un État étranger. L’absence de garantie sur leur localisation géographique et, par conséquent, sur le type de cadre juridique en application pose donc la question de la protection de ces données stratégiques.
La capacité à garantir la souveraineté des données est devenue à la fois une question politique et une urgence. Le choix de l'opérateur chargé de la collecte et du traitement des données s'impose comme une réflexion de premier ordre, peu importe les structures concernées.
Pourquoi cet engouement pour les Big Data ?
Les Big Data changent profondément notre quotidien. Le traitement de ces masses de données via des algorithmes de calcul permet en effet de démultiplier nos capacités à connaître un environnement, à prévoir les comportements des éléments qui le composent, et donc à interagir avec eux tout en leur fournissant des services adaptés.
En traitant ces mégadonnées, nous les interprétons et en tirons de l’information utile (ce que l'on appelle Smart Data). Les 'Smart Cities'- ou villes intelligentes - illustrent parfaitement cette exploitation intelligente et utile des données. Un exemple : les données liées aux véhicules entrant dans une agglomération peuvent être collectées, traitées et interprétées. Ensuite, les informations liées à l’état de la circulation peuvent être envoyées aux usagers en temps réel.
Outre les Smart Cities, les champs d’application des données intelligentes sont extrêmement variés : santé, défense, entreprises, industrie, énergie, institutions, collectivités. Elles sont d’ailleurs considérées comme le moteur de la transformation numérique, que beaucoup décrivent comme la 4e révolution industrielle.
De la donnée à l'information
Au cours des dernières années, la production de données numériques a connu une augmentation massive. L'an dernier, on a compté plus d’appareils connectés que d’êtres humains sur la planète. En 2025, la quantité totale de données produite est estimée à 175 Zo (zettaoctet, soit 1021 octets). Traduction : le volume des données créées explose.
Cette évolution exponentielle est soutenue par l’émergence de technologies telles que le Cloud Computing qui, en fournissant à la demande, de la puissance de calcul, des bases de données, du stockage et des applications, s’avère le terreau idéal pour la multiplication de ces données numériques.
Cette masse de données (Big Data) n’est pas une simple tendance. Il s’agit d’un concept omniprésent, complètement intégré aux stratégies de développement des entreprises et des institutions publiques.
COVID-19 : accélérateur de transformation numérique
La crise liée à la pandémie de COVID-19 a généré une mutation rapide de l'activité professionnelle. Elle s'est notamment matérialisée par la généralisation du télétravail. Problème : les outils technologiques les plus utilisés dans le cadre du travail à domicile sont ceux qui permettent la collaboration en ligne, l’envoi de fichiers lourds et le partage de documents sur des espaces de travail. Des outils reposant sur des technologies Cloud, à travers lesquelles sont échangées des données potentiellement sensibles.
En Belgique, les applications les plus communément utilisées par les organisations telles que Office 365, Microsoft Teams, Zoom, Google Workspace et Dropbox ne présentent pas toutes les garanties de sécurité. D’une part parce qu’elles sont la cible de cyber-attaques toujours plus fréquentes et diversifiées. D'autre part parce qu’elles sont régies par le droit américain, peu protecteur.
Ces risques sont connus. Pourtant, une étude récente montre que suite à cette crise sanitaire, la majorité des entreprises vont accélérer le passage au Cloud en y migrant l’ensemble des applications. L’objectif est notamment de se préparer à une adoption plus généralisée du télétravail, où il serait nécessaire d’accéder à distance à l’ensemble de ses applications métier.
La transformation numérique et le passage au Cloud ont connu une accélération dans les circonstances de la crise de la COVID-19. Opter pour des outils de travail virtualisés ne s’improvise pas. Cette mutation doit s’accompagner d’une réflexion sur les prestataires et aux garanties offertes par leurs outils, en matière de sécurité des données. La prudence incitera à se tourner vers des acteurs de confiance, localisés sur le territoire européen et, surtout, national.